Peter Pan a sa statue à Kensington Garden. Je suis tombée dessus une fois par hasard.. Peter Pan c’est le pays imaginaire, s’il le quitte trop longtemps les enfants perdus ne se battent plus avec les pirates et le monde s’endort. Londres c’est parfois un peu comme le pays imaginaire… Quand on quitte la fac, qu’on cherche son premier job, l’appel de Londres est un appel puissant . Tout y est possible, on rencontre des gens des quatre coins du monde avec des métiers passionnants et puis avant qu’on s’en rende compte on oublie la « vraie vie », on reste coincé dans le pays imaginaire où l’on vit des aventures fantastiques et rencontre des gens dignes de personnages de roman.
Peter Pan, à force de ne pas grandir, revit toujours la même chose. Quand les enfants perdus sont trop grands, il s’en débarrasse – grandir c’est contraire au règlement – et puis les fées ont une durée de vie très courte, les méchants changent et ses aventures s’enchainent… Mais pour rester cet être joyeux, innocent et aussi un peu parfois sans cœur, Peter Pan oublie ses anciens amis et ses anciennes aventures. Vivre dans l’instant n’est possible qu’au prix de son propre passé. Et le passé, l’expérience c’est une part importante de notre identité. Pour moi le syndrome de Peter Pan c’est sans doute refuser de grandir mais c’est aussi et peut-être surtout fuir son passé. Dans la vraie histoire, Peter Pan ne remplit pas sa promesse de revenir voir Wendy tous les ans. C’est triste.
Un jour, on a le choix : continuer à vivre comme Peter Pan dans la quête constante du bonheur immédiat, en oubliant le prix qu’on paie pour ça ou rentrer chez soi comme Wendy et ses frères : vivre sa vie, assumer son passé, ses sentiments et chérir ses souvenirs. Alors oui, cela vient en grandissant, avec des responsabilités mais c’est sans doute le prix du bonheur. Je ne veux pas d’une vie qui soit une suite infinie de petites histoires avec des personnages différents à chaque fois. Je ne veux pas oublier les endroits, les visages du tourbillon de ma vie. Je ne veux pas oublier ma promesse à Wendy, je veux vivre une seule et longue histoire et me souvenir de tous les détails. .Je veux chérir chacun des personnages qui peuplent l’histoire de ma vie.
La naissance de mon petit bout m’a fait réalisé qu’il était temps de quitter mon pays imaginaire et de rentrer à la maison. Subitement, tous les personnages de l’histoire de ma vie prennent un relief différent : les bons, les méchants, les Peter Pan, les Wendy et les capitaines Crochet… Je ne sais pas trop où est ma maison en ce moment et quels sont les personnages qui vont peupler tous les autres chapitres de ma vie mais Peter Pan au final c’est un petit garçon solitaire et moi maintenant je suis une maman.